Il est temps de mettre fin au marché du carbone européen ! Pour une véritable transition énergétique. | Attac France
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Il est temps de mettre fin au marché du carbone européen ! Pour une véritable transition énergétique.
février 2013 - par Les Amis de la Terre France, La Confédération paysanne, Attac France, and AITEC
Plus de cent-dix organisations de la société civile ont rendu publique une déclaration qui exige de l’Union européenne (UE) qu’elle abandonne le marché du carbone européen (ETS). Après sept ans d’échecs répétés, l’UE a perdu toute crédibilité lorsqu’elle annonce vouloir « corriger » ses défaillances. Inefficace, coûteux et dangereux, le marché carbone européen entrave toute politique climatique à la hauteur des enjeux, c’est-à-dire qui permette de réduire drastiquement la forte dépendance de l’UE aux énergies fossiles et de transformer profondément nos modes de production et de consommation.
Le Parlement Européen va être amené à se prononcer sur les propositions de la Commission européenne visant à réduire (faiblement) le nombre excessif de droits d’émission actuellement en circulation afin de stopper l’effondrement du marché du carbone européen. Cette proposition, publiquement soutenue par le gouvernement français sans qu’il n’y ait eu de débat, n’est pas acceptable. Les organisations soutenant la déclaration « Il est temps de mettre fin au marché du carbone européen ! » invitent les institutions européennes, les élu-e-s, la société civile et les citoyen-ne-s européen-ne-s à regarder les faits en face et en tirer les conclusions qui s’imposent.
En l’absence1 de preuves établissant un lien de causalité entre les réductions d’émissions observées après 2008 – principalement dues à la crise économique – et le marché du carbone européen, les organisations soussignées rappellent que le marché du carbone européen :
n’est pas efficace : les émissions des secteurs économiques relevant du marché carbone diminuent moins vite (1,8 %) que celles des secteurs ne relevant pas de ce système (3 %) ;
ne permet de pas de réduire les émissions domestiques : en prenant en compte les émissions liées aux produits importés, les émissions n’ont baissé que 4% entre 1990 et 2012, et non 17,5 % ;
sert d’échappatoire au secteur industriel : l’introduction de certificats de réductions d’émissions liés à des opérations de compensation menées hors UE s’accroît considérablement, au point de représenter 13% des émissions domestiques du secteur (+ 85 % en 2011 par rapport à 2010), aggravant la situation de surabondance de crédits carbone ;
contribue à accroître les conflits sociaux et environnementaux en encourageant l’accaparemment des terres, les violations des droits de l’homme, les déplacements forcés et les atteintes à l’environnement liés à la mise en oeuvre des projets de compensation carbone ;
fonctionne comme un système de subvention des pollueurs : l’attribution gratuite des permis est de facto une subvention qui permet aux industriels – notamment Arcelor Mittal et Lafarge – d’engranger des milliards d’euros : 14 milliards2 entre 2005 et 2008 et 7 milliards par an jusqu’en 2020 pour les 75% de permis qui seront toujours distribués gratuitement ;
fait retomber le coût sur les consommateurs : presque l’intégralité du coût de mise en conformité du secteur industriel avec le marché carbone européen aurait été financé par les consommateurs ;
incite les secteurs industriels au statu-quo : en raison de son fonctionnement, du trop grand nombre de permis existants et de comportements spéculatifs, le marché carbone ne délivre aucune incitation économique pouvant provoquer une transformation profonde du système productif ;
est coûteux et particulièrement sujet à la fraude : fondé sur des mesures d’émissions souvent incertaines ou invérifiables et faiblement encadré sur le plan réglementaire, il est propice aux abus et aux fraudes – plus de 5 milliards d’euros de perte en 2010 – faisant à dire à Europol que « dans certains pays, jusqu’à 90 % du marché du carbone était le fait d’activités frauduleuses »3.
sert d’excuse à l’Union Européenne : bloquée sur un engagement de 20% de réduction d’émissions – soit un objectif légèrement inférieur pour la deuxième période du protocole de Kyoto (1,5 % par an) que pour la première (1,6% par an) – l’UE refuse de passer à des objectifs de 40 % de réduction d’ici 2020 et de 80 à 95 % d’ici 2050, seuls à -même d’être à la hauteur des défis climatiques ;